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Contexte et enjeux : les cas du Laos et de Madagascar

Enjeux

Dans ces deux pays la prévalence des affections bucco-dentaires est élevée. Au Laos, 72,9% (lao national Survey, 2010-2011) des enfants de 12 ans sont atteints de carie dentaire sur les dents définitives et à Madagascar 60% (Petersen et al ; 2005). Ces pathologies ont un impact sur les individus et les communautés en termes de douleur, de perte de fonctions, de coût et plus généralement de réduction de la qualité de vie. L’enjeu principal de la seconde phase est la poursuite des activités de la phase1 pour l’intégration de la santé bucco-dentaire dans la santé générale, l’appui à la mise en place de stratégies pertinentes concernant la formation, la prévention et la sécurité des soins. Le projet par son approche transversale entre les deux pays permet des synergies et de capitaliser les acquis en fonction des disparités notamment géographiques, démographiques et organisationnelles. En effet, Madagascar est une grande île de 24 millions d’habitants bénéficiant de conditions climatiques favorables avec de grandes exploitations de sel. Au sein du ministère de la santé un service de santé bucco-dentaire est intégré. Le Laos est un pays enclavé de 7 millions d’habitants, d’une surface égale à environ la moitié de celle de Madagascar, avec des conditions difficiles d’exploitation du sel. Il n’existe pas de représentation bucco-dentaire au sein du ministère. Les situations entre les deux pays ont des points communs : un accès limité au fluor, des risques d’infections nosocomiales élevés, des formations parfois limitées des cadres de la santé.

 

Problème 1 : accès limité de la population au Fluor

La carie dentaire est évitable et la méthode indiscutée et reconnue de prévention est l’usage approprié du fluor. Au Laos et à Madagascar, le dentifrice et la fluoration du sel iodé ont été choisis par le ministère de la santé, chaque méthode ayant des avantages et des inconvénients. Pour les dentifrices fluorés, les deux principaux facteurs à considérer sont l’accessibilité financière car le prix est trop élevé pour la majeure partie de la population et la qualité en termes de niveau de fluor et d’efficacité. La nouvelle phase du projet  accompagne l’application des résolutions de l’atelier national de promotion de l’accès au fluor[1] qui s’est tenu en juin 2017 à Madagascar. Les recommandations concernent à la fois une législation pour la production, l’importation, la distribution, le conditionnement et l’étiquetage des dentifrices fluorés répondant aux normes mais aussi la mise en place de méthodes de contrôle de qualité et d’amélioration de l’accessibilité financière des dentifrices fluorés produits et distribués dans le pays.

La fluoration et l’iodation du sel présentent l’avantage d’être d’un coût peu élevé et rendent le fluor et l’iode accessibles à la plus grande partie de la population. Au Laos et à Madagascar les programmes ont démarré en 2005 en cohérence avec la politique nationale. Une évaluation réalisée en 2013 par l’OMS à Madagascar a montré que le sel produit ne répondait pas aux normes. Depuis, lors de la phase 1 du projet, des actions concrètes ont été menées dans les deux pays avec la mise en place d’un partenariat public / privé. La situation à Madagascar est prometteuse avec l’implication des deux principaux producteurs du pays et du ministère de la santé. Celle du Laos est plus complexe et ne sera  soutenue que si la condition suspensive liée à la parution d’un décret rendant obligatoire l’iodation et la fluoration du sel est levée. Les facteurs de réussite d’un tel programme ont été bien identifiés et comprennent un cadre législatif, une confiance entre les producteurs et le ministère de la santé, une concertation entre les partenaires, un contrôle de qualité opérationnel, un appui technique aux producteurs, des modalités de financement des intrants (iode et fluor) et une communication adaptée. Le projet porte sur la poursuite du renforcement des producteurs, le contrôle de qualité du sel iodé et fluoré à différents niveaux et l’appui à la communication auprès de la profession dentaire, de la population, des agents de santé, des producteurs et des distributeurs.

[1] Organisé par le ministère de la santé en collaboration avec l’OMS et l’AOI

Problème 2 : risque d’infections liées aux soins

L’évaluation de la phase 1 du projet, réalisée en juin-juillet 2017, a fait émerger l’opportunité et la nécessité de poursuivre des actions de promotion de la prévention des infections liées aux soins dans le cadre de l’amélioration de l’accès aux soins de qualité au niveau des deux pays. Parmi celles-ci, pour Madagascar, il a semblé opportun d’initier des actions de prévention des infections liées aux soins au niveau de la faculté dentaire de Majunga (IOSTM), en s’inspirant de la démarche entreprise au Laos. La démarche consiste à appuyer les enseignants et les dirigeants de la faculté pour la mise en place d’un enseignement sur la sécurité des soins intégré dans le curriculum de formation des étudiants.

L’évaluation de plus d’une vingtaine de centres de santé (avec un service dentaire) à Madagascar, a montré que la sécurité des soins reste incertaine au niveau de la grande majorité des formations sanitaires du fait de l’insuffisance des moyens et des connaissances des agents de santé ainsi que du manque de collaboration entre les services. Afin de répondre de manière globale à ce problème et d’obtenir des résultats à l’échelle nationale, comme il a été suggéré dans le cadre de l’évaluation de la phase 1, la phase 2 comprendra un volet visant à appuyer l’instauration d’une politique nationale ainsi que l’harmonisation des protocoles en matière de prévention des infections nosocomiales à Madagascar. En effet, la mise en œuvre de la phase 1 a montré que les partenaires techniques et financiers faisaient la promotion de différents protocoles de traitement et stérilisation de l’instrumentation. De nombreux centres de santé à Madagascar utilisent des matériels ou appareils inadéquats pour stériliser leurs instrumentations. Le projet s’attachera à appuyer la mise en application des consignes par l’enseignement au niveau des facultés dentaire et de médecine ainsi que des écoles de formation paramédicale.

Toujours dans le sens de l’amélioration de la qualité et sécurité des soins à Madagascar, le projet phase 2 poursuivra les activités d’appui à la prévention des infections liées aux soins au niveau des formations sanitaires. Comme suggéré dans l’évaluation, le choix des CSB se fera au niveau des districts sanitaires bénéficiaires du projet phase 1. Ce volet d’activité permettra de former et suivre une centaine de médecins, paramédicaux et personnels de centres de santé.

Au Laos, l’AOI a accompagné la rénovation de la faculté dentaire de Vientiane, le développement d’outils de formation adaptés et l’intégration d’un module sur la sécurité des soins dans l’enseignement. A partir de 2018, selon les recommandations de l’évaluation, ces actions seront étendues à un niveau plus large (faculté de médecine, écoles d’infirmiers et sages-femmes. La faculté dentaire de Vientiane ainsi que les autres facultés médicales sont engagées dans la réforme de leurs dispositifs d’enseignement en faisant évoluer progressivement les curricula de formation. Un appui sera apporté pour la planification de programmes de formation et la construction d’outils d’évaluation des étudiants pour la sécurité des soins.

La plupart des hôpitaux du Laos connaissent une situation difficile en termes d’hygiène et de prévention des infections nosocomiales. Il existe une politique en faveur de la prévention des infections nosocomiales. Un programme de formation des comités a été mis en place avec l’OMS. En 2015, un guide a été développé. En 2016, le ministère a mis en place des procédures standards testées dans les hôpitaux de Vientiane. Des comités pour l’hygiène, la prévention et le contrôle des infections (CHPCI) existent dans chaque hôpital. Le Ministère de la santé établit un plan national sur le contrôle des infections qui va recevoir le soutien de la BAD et de l’OMS. Le projet phase 2 accompagnera, de manière ciblée, la mise en place de ce plan et de son suivi ; la faculté dentaire et l’ADL se positionnant en formateurs et favorisant des échanges d’expériences.

A Madagascar et au Laos, outre l’appui à des centres de santé publics, une action pilote auprès de chirurgiens-dentistes privés sera initiée dans le cadre du projet phase 2. En effet, dans ces deux pays, les praticiens privés ont besoin, au même titre que ceux du public, d’améliorer leurs pratiques en termes de sécurité des soins. Ce volet consiste à les former aux protocoles mis à jour en matière de traitement de l’instrumentation et à les appuyer techniquement pour mettre en place les pratiques afférentes à ces protocoles au niveau de leur cabinet.

Problème 3 : renforcement des compétences des cadres

Au Laos, les cadres du ministère de la santé et plus précisément de deux départements (hygiène et promotion de la santé / santé curative) sont responsables de la mise en place du programme de fluoration et d’iodation du sel ainsi que de la réduction des infections liées aux soins. Cependant leurs connaissances restent limitées concernant les stratégies, les méthodes d’évaluation et de planification. La politique nationale sectorielle est récente et ses acteurs ont peu de moyens financiers et humains pour l’initier et la développer. Malgré la dynamique existante au sein de ce groupe de cadres, leur capacité à mettre en place des programmes, nécessitant un degré d’expertise élevée, reste limitée. Ils souhaitent renforcer leurs compétences, être accompagnés pour développer des programmes de qualité et un réseau d’échange d’expérience sous régional. Une nouvelle unité de santé orale au sein du ministère de la santé devrait être opérationnelle et une stratégie nationale en santé bucco-dentaire initiée. L’ADL et les CHPCI ont des moyens et une expérience limités et seront également bénéficiaires d’initiatives de renforcement des capacités.

A Madagascar

Le SSOABD est l’institution qui régit et organise le programme national de santé bucco-dentaire. Les responsables du service qui élaborent le plan d’action ont reçu une formation en santé publique (Master de santé publique à la faculté d’odontostomatologie de Mahajanga). Les activités d’échanges et de formation permettent de renforcer la capacité des acteurs. Ainsi, ils sont appuyés dans la mise en place d’activités ayant fait leur preuve dans d’autres contextes.

Par rapport au renforcement de capacité des cadres de la santé, notamment dans le secteur dentaire, les principales offres sont des formations aboutissant notamment à une spécialisation en santé publique. Des formations continues de quelques jours sont également proposées par certains partenaires techniques et financiers par rapport à des techniques spécifiques de soins dentaires. Ces différentes formations s’adressent souvent à des individus et les offres de renforcement des associations ou organisations professionnelles sont rares. C’est pourquoi le présent projet porte également sur le renforcement de quelques associations professionnelles intervenant dans le secteur de la santé, telles que l’association de dentistes scolaires « Soatsiky », le Conseil de l’ordre des chirurgiens-dentistes de Madagascar. Ce volet consiste à appuyer ces organisations à se former en santé publique pour qu’elles puissent renforcer leur rôle de référent.

Dans le cadre du projet, l’équipe du SSOABD bénéficiera aussi de renforcement de capacités. Par ailleurs, en tant qu’acteur principal de la coordination des actions de promotion de la santé bucco-dentaire, les renforcements sur le plan organisationnel et en termes de moyens seront poursuivis durant la deuxième phase du projet. En outre, des renforcements de capacités en matière de recherche de financement seront également entrepris.

Capitaliser sur les acquis

Les activités consistent à documenter les bonnes pratiques et les leçons apprises du projet pour chacun des différents volets et d’en faire des publications dans des revues spécialisées de manière à capitaliser et à partager les acquis du projet. D’autre part, certaines activités menées à Madagascar et au Laos seront valorisées au niveau régional ou sous régional avec la collaboration de l’OMS. Il ressort de l’évaluation de la phase 1 du projet la nécessité de promouvoir et de capitaliser les résultats Il est important de faire connaître les acquis du projet auprès des autres secteurs médicaux et des autorités. Les synergies entre les deux pays qui ont eu un effet positif sont à poursuivre. Au Laos, des leçons sont à tirer du renforcement institutionnel de la santé orale réalisé à Madagascar. De son côté, Madagascar peut tirer profit de l’expérience de la faculté dentaire du Laos pour améliorer la formation initiale des étudiants.

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